Mode in Textile

Vers une mode sans genre et durable ?

Depuis plusieurs années les questions de genre agitent nos sociétés, tandis que la question des droits des personnes transgenres, les discriminations dont elles font l’objet et leur présence dans le monde de la mode, sont de plus en plus visibles. 

On peut rapidement définir le genre comme les valeurs et représentations associées à chaque sexe, dans la mode c’est la division classique entre féminin et masculin, et les formes, couleurs, matières qui y sont associés, et donc les symboles qui en découlent.

Présentée par certains comme le futur de la mode durable, la mode « gender neutral » ou non genrée s’affirme.

La fin des stéréotypes

La mode non genrée, va plus loin d’une certaine manière que les collections unisexe. Il ne s’agit plus seulement de proposer des vêtements qui vont aux hommes comme aux femmes, mais des vêtements dont les caractéristiques formelles, techniques, esthétiques, ne sont pas l’apanage d’un genre et d’un sexe.

Cependant, comme le rapport le magazine Antidote, malgré un mouvement vers l’acceptation, il est difficile pour beaucoup d’assumer au quotidien des vêtements d’un genre différent du leur. Si beaucoup de marques ont brouillé les frontières entre féminin et masculin dans leurs collections, telles que Gucci, JW Anderson, ou encore Rick Owens il n’est pas pour autant évident au quotidien pour un homme de porter un haut en dentelle de Calais.

Aussi, certaines formes, la jupe par exemple sont encore associées à la féminité, du moins en Occident. Certaines matières, l’organza, la dentelle, la soie dans une certaine mesure – tout ce qui relève de la fluidité et de la délicatesse sont là encore d’une part des savoir-faire historiquement féminins (contrairement au tailoring qui est plutôt masculin) et donc associés à la féminité – et les stéréotypes de celle-ci : sensibilité, fragilité, vulnérabilité, entre autres. Et tandis que les règles de don et de contre-don sont plus simples d’homme à femme – car il est plus valorisant pour une femme de porter des vêtements d’hommes (et donc l’imaginaire de masculinité et de force associés), le contraire est beaucoup moins évident ! 

De quoi témoigne cette volonté d’abolir le genre dans la mode ?

Pour autant ce brouillage des codes du genre apparaissait déjà dans la mouvance punk, où les différences formelles entre hommes et femmes étaient brouillées au profit d’une esthétique globalisante (qui était avant tout l’expression d’un mode de vie) : les coiffures, les vestes en cuir, les épingles…tout cela contribuait à masquer les signes de genre évidents propres à chaque sexe, et in fine contribuait à casser les codes bourgeois contre lesquels s’érigeait le punk.

De nos jours, dans un contexte politique lourd, où les identités sont de plus en plus fractionnées, la volonté de briser les codes archaïques se fait de plus en plus présente. Aussi la montée en parole des combats de personnes transgenres est significative de la place que ces préoccupations tiennent dans notre quotidien. On retrouve notamment cette prise de parole dans la mode, où un certains nombres de mannequins transgenres défilent, telle que Fin Barrett, Teddy Quinlivan ou encore Munroe Bergdorf, et ont également à l’instar de cette dernière un rôle d’activiste.

Cette tendance n’a pas échappé aux créateurs, avec par exemple Galliano pour Maison Margiela qui pour l’Automne-Hiver 2019 a opté pour une collection unisexe. Aussi, désormais les créateurs et créatrices se jouent des stéréotypes, en faisant porter des jupes à des hommes, en maquillant les mannequins, en leur faisant porter de la dentelle transparente (Gucci), en somme en détournant les codes de la féminité et de la masculinité. 

Le chemin vers une mode durable ?  

Finalement cette mode sans genre, au-delà des questions de représentations qu’elle peut débloquer s’inscrit peut être dans le chemin vers une mode durable. La mode durable, au sens premier a pour but de diminuer notre empreinte, ainsi que de protéger notre bien-être – aussi la possibilité de pouvoir s’affranchir des normes assignées à chacun et chacune contribuent déjà à cette seconde option. 

En termes de réduction de coût une mode sans genre peut être intéressante : dans la sphère du couple, familiale ou amicale, en favorisant les échanges entre les individus. Ensuite en termes d’inclusion la mode sans genre élève l’idée d’un monde où le sexe, les attributs physiques et le genre n’ont aucune espèce d’importance – aussi non seulement il devient important de produire des vêtements respectueux de l’environnement et des humains, mais aussi de les inclure dans leur globalité.

-03/04/19-