Mode in Textile

Slow fashion : la mode passe à la vitesse inférieure

La mode n’a pas échappé à la culture fast. Il n’y a pas si longtemps, les marques se contentaient d’une collection par saison, voire seulement deux par an. Puis ce fut l’escalade. Les rayons sont maintenant renouvelés jusqu’à deux fois par mois. La haute-couture n’y échappe pas, puisque certaines maisons proposent désormais une dizaine de collections annuelles. Un phénomène en passe d’être détrôné par un mouvement qui en prend le contre-pied : la slow fashion.

La slow fashion pour contrer les méfaits de la consommation jetable

La slow fashion s’oppose en bien des points à cette course effrénée à la mode. D’abord, les acteurs de cette nouvelle tendance ont à coeur de protéger la nature. Car lorsque l’on sait que la culture de coton nécessite 60 fois plus d’eau que celle des céréales ou de la salade, on saisit mieux l’enjeu de réduire cette production pourtant grandissante. Si l’on ajoute à cela le fait que l’industrie textile est la deuxième émettrice de CO2, on comprend pourquoi certains appuient sur le frein.

Par ailleurs, cette mode ultra rapide présente d’autres dangers. Pour pouvoir écouler leurs stocks et les renouveler aussi fréquemment, les marques doivent tirer les prix vers le bas. Cela suppose deux choses : le plus souvent, la main d’oeuvre employée est exploitée, et les pièces sont de si piètre qualité qu’elles sont quasiment jetables. On entre là dans un cercle vicieux, incitant les clients à racheter régulièrement de nouveaux vêtements. Quant au style, il finit par être moins personnalisé qu’uniformisé.

Vivienne Westwood : “Acheter moins, choisir mieux, faire durer.”

La slow fashion propose donc un nouveau mode de consommation. Les jeunes entrepreneurs et les blogueuses qui cherchent à sensibiliser à la slow fashion ne s’y trompent pas. Ce ne sont pas les géants modernes qu’ils citent, mais bel et bien ceux qui ont fait la mode. Loren, du blog soyonselegantes.com, rappelle combien Coco Chanel détestait l’idée que la mode puisse être jetable. “Je ne peux accepter que quelqu’un jette ses vêtements juste parce que c’est le printemps.” Et à reprendre l’une des maximes de Vivienne Westwood, on pourrait la penser à l’origine de ce mouvement slow. “Acheter moins, choisir mieux, faire durer.”

Telle est finalement la devise de tous les acteurs de la slow fashion. Le point de départ : se débarrasser du superflu en réalisant que la loi de Pareto s’applique aussi dans nos placards. La plupart d’entre nous portent en réalité seulement 20% de leurs vêtements 80% du temps. Cela devrait suffir à mieux les choisir. Mieux, c’est-à-dire de meilleure qualité, plus en accord avec son propre style, mais aussi dans un souci d’éthique.

Et aujourd’hui, nombreux sont ceux qui se donnent la main pour une mode plus verte. En premier lieu, on pense aux jeunes marques, comme Loom, créée en 2016, dont les produits sont conçus pour durer, tout en restant à prix raisonnables. Ou bien encore Veja (“regarde” en brésilien) et Hast, qui misent sur la transparence et la traçabilité de leurs vêtements. Toutes ne misent pas forcément sur le 100% Made in France, qui bénéficie pourtant de ce nouveau mode de consommation, mais sont vigilantes sur l’éthique des processus de fabrication.

La slow fashion, chacun sa contribution

Autres acteurs de la slow fashion, les enseignes comme Kilo Shop ou Hippy market. Loin d’être démodées, elles offrent une seconde vie aux habits. Cela fonctionne si bien, que de nombreuses applications et autres versions web de ces friperies voient régulièrement le jour. Ce qui implique, comme le suggère la prêtresse du rangement Marie Kondo, de trier. Ce qui n’a plus droit de cité dans nos armoires peut bien entendu être donné à des associations pour les plus démunis, ou à des organismes qui se chargeront de les recycler. Et ceux qui manqueraient de place pour stocker leurs vêtements hors-saison, certains sites proposent même une solution de garde-robe.

Mais cela va plus loin encore. De plus en plus, chacun se sent concerné et participe à son échelle à freiner ce phénomène de fast fashion. La marque Patagonia par exemple, publie régulièrement des tutoriels. Loin de pousser à la consommation, elle incite ses acheteurs à réparer leurs vêtements lorsqu’ils sont abîmés. Les vidéos, associations, livres, magazines et autres sites proposant des DIY pour apprendre à créer, customiser ou recycler ses propres vêtements fleurissent partout. De même, on note un grand engouement pour la couture et le tricot, hobbies jadis réservés aux ménagères de plus de 50 ans.

Octobre 2017